Aider l’enfant à surmonter ses peurs
La psycho dans Signes & sens
Aider l’enfant Un article de Psychanalyse magasine / Dimitri HAIKIN |
“ Papa, laisse la lumière allumée, j’ai peur dans le noir ”, “ Je voudrais tant mais je n’ose pas aller sur le manège de chevaux de bois ”, “ Une sorcière va venir dans ma chambre, je ne veux pas rester tout seul ”, “ J’ai peur quand tu cries sur moi ”… Tous les enfants du monde traversent des peurs aux différentes périodes de leur vie. La peur est universelle. Cet article propose aux parents et aux “ éducateurs ” de l’enfant d’adopter un positionnement respectueux, à l’écoute de ses peurs.
La peur est l’une des grandes émotions de base que rencontre l’être humain dans la vie. Les trois autres sont la joie, la tristesse et la colère. Chacune d’elles a son utilité. La peur, qui a cette fonction essentielle de nous alerter d’un état de danger, est d’abord physiologique avant d’être psychologique. Elle va permettre de prendre la fuite et de se protéger face à l’imminence d’un danger ou encore indiquer que nous ne sommes pas prêts à affronter telle ou telle situation. Celui qui se refuse à ressentir la peur se prive d’antennes bien précieuses et se mettra tôt ou tard en danger. Elle nous apprend à faire face à l’inconnu. Petite ou grande, démesurée ou non, aucune peur n’est ridicule. Chaque peur est bonne à prendre, et surtout à accompagner, à écouter, dans toute sa dimension psychique. Le temps pour apprivoiser la peur, puis la dépasser, ouvre les portes du courage et de l’estime de soi.
Un contenant nécessaire
Certaines peurs sont plus courantes que d’autres chez l’enfant. Le bébé de huit/dix mois est souvent confronté à la peur des visages étrangers, non familiers. Il a besoin d’être rassuré par la parole sécurisante de ses proches pour accepter le contact avec cette personne étrangère à sa vie. Avant cela déjà, le bébé est confronté à diverses peurs liées aux changements soudains d’atmosphère. Le stress, un bruit inhabituel et sourd, la lumière brutale dans la pièce, le fait de se retrouver seul dans un nouvel environnement – la crèche par exemple – sont autant de facteurs déclencheurs de la peur chez le tout jeune enfant. Il sursaute, hurle, panique. Il est fondamental de le reconnaître dans sa peur, de lui dire : Je crois que tu as peur. En fait, j’ai laissé tomber une casserole par terre dans la cuisine… C’est ne pas sous-estimer les peurs du bébé et chercher chaque fois les mots qui le mèneront sur le chemin de la réassurance. N’oublions pas non plus la puissance inestimable du contact affectif de l’enfant. Il lui offre, bien souvent, le contenant dont il a besoin pour faire face et dépasser sa peur.
L’angoisse de la petite mort
Pour certains, la peur de s’endormir indique une difficulté à lâcher le contrôle. La mise en place de petites habitudes d’endormissement permettra à l’enfant de retrouver un sentiment de sécurité intérieure. La qualité de présence de l’adulte proche, ses paroles attentives, ses élans affectifs, amèneront plus facilement l’enfant au lâcher prise salvateur. Les enfants ont tellement soif de découvrir la vie qu’ils ont parfois le sentiment que dormir c’est perdre son temps ! Françoise Dolto évoquait “ l’angoisse de la petite mort ”. Expliquons-leur que dormir permet de se ressourcer pour avoir l’énergie de mieux jouer encore demain… Souvent le jeune enfant de deux ans traverse des périodes de cauchemars. Une approche est de le faire parler du film de son cauchemar ou encore de lui proposer de le dessiner comme il s’est déroulé dans sa tête, avec un début, un milieu et une fin, pour ensuite partager, par un échange verbal, les enjeux de ce cauchemar pour lui. Pour les enfants à peine plus âgés, Françoise Dolto prescrivait trois moyens au petit d’Homme pour s’apaiser : une petite lampe à proximité pour reprendre contact avec la réalité, un verre d’eau pour retrouver le contact avec soi-même et un bloc de feuilles à dessiner et des crayons afin d’évacuer de soi la peur angoissante. Cette triple prescription donne toujours de bons résultats. La fonction du cauchemar est de permettre d’évacuer les choses qui angoissent dans le quotidien. Un cauchemar répétitif, voire des terreurs nocturnes, indique qu’une peur n’a pas encore été entendue dans toute son ampleur. Ces frayeurs, bien souvent, traduisent un état d’insécurité affective. De nombreux enfants ont peur du noir. Une fois encore, il convient d’entendre, accompagner et respecter l’enfant face à cette peur. Trouvons avec lui des astuces qui lui permettront de se sentir quand même en sécurité : une petite veilleuse, le rideau entrouvert, la lumière dans le couloir…
Les contes et les films
Pour autant, nombre d’enfants et d’adolescents aiment ressentir la peur. Comme s’ils avaient besoin de jouer avec le côté excitant et vivant de celle-ci. L’enfant va redemander une énième fois qu’on lui raconte l’histoire de l’horrible sorcière et l’ado va regarder, en boucle, les effrayantes aventures de l’inénarrable Freddy. Au fond, quand ils sont accompagnés par l’adulte, ces temps permettent d’expérimenter la peur et ses réactions face à elle. Les contes et les films sont, en quelque sorte, d’excellents laboratoires de nos peurs. Ils ont existé de tout temps et nous préparent à nous défendre au moment utile.
Les 10 conduites à éviter quand un enfant a peur :
1) Nier
Ce n’est rien !
Réaction que nous utilisons à tour de bras, quand un enfant tombe, parce que nous pensons ainsi le protéger de sa peur. Au contraire, reconnaissons-la ! Tu as eu peur ? Tu t’es fait mal ? J’ai eu peur aussi d’ailleurs quand je t’ai vu tomber !…
2). Vouloir rassurer à tout prix
Attitude revenant également à nier l’émotion pourtant présente chez l’enfant. Les fantômes, ça n’existe pas. Cela lui fait une belle jambe… Écoutons d’abord ce qu’il perçoit comme dangers potentiels, pour lui, à rencontrer un fantôme, ce qu’il imagine de cette rencontre fantasmatique. Ensuite seulement, rassurons-le.
3). Minimiser
Une grosse bête qui a peur d’une toute petite !
Qui n’a jamais entendu cette réponse, un jour ? Cherchons plutôt à comprendre ce que représente cette petite bête pour l’enfant et ce qui pourrait le rassurer.
4). Humilier
Bébé Cadum, poltron !
Rien n’est pire que de se sentir jugé ou humilié quand on a peur. Cela crée à jamais des blessures narcissiques et empêche le développement de l’estime de soi.
5). Surprotéger
Tu vas tomber !
Le risque est alors de sur-dimensionner la peur initiale de l’enfant ou de transposer les propres peurs de l’adulte à l’enfant ; c’est ainsi l’empêcher d’évoluer face à une telles situation.
6). Forcer
Viens avec moi maintenant et tu verras qu’il ne t’arrivera rien !
Type d’injonction contraignante qui peut vraiment créer, non seulement un sentiment de panique chez l’enfant mais, de surcroît, ne lui permet en rien de sentir grandir en lui la fierté légitime d’avoir dépassé sa peur par ses propres ressources intérieures. Laissons aux enfants le temps nécessaire à l’apprivoisement de leurs peurs. Et tant pis pour nos désirs, urgents, d’adultes !
7). Culpabiliser
Tu vois, à cause de toi, on n’a pas pu aller sur les montagnes russes…
Type de message qui amplifie la peur de l’enfant et est un frein à son dépassement potentiel !
8). Comparer
Ta sœur, elle, au moins, ose.
L’un n’est pas l’autre. Comparer amène celui qui a peur à se sentir inférieur ; cela n’arrange rien du tout, au contraire !
9). Préjuger
Tu es trop petit pour y arriver.
Même si nous sommes là, en tant qu’adulte, pour protéger l’enfant, donnons-lui également la possibilité de s’auto-évaluer face à sa capacité d’atteindre tel ou tel objectif.
10). Crier
Attention !
Voilà le genre d’intervention qui peut créer un état de panique chez l’enfant. Personne n’aime, quand il conduit sa voiture, entendre son passager hurler à ses côtés. N’en va-t-il pas de même pour l’enfant ?
Les 10 attitudes préconisées pour aider l’enfant à surmonter sa peur :
1). Le respect
Chaque peur mérite un accueil respectueux : que l’enfant se sente le droit d’avoir peur.
2). La présence affectueuse
Le contenant qu’apporte celui qui écoute la peur permet d’amener l’enfant à un apaisement face à l’intensité débordante de sa peur.
3). L’écoute
Sans chercher à rassurer à tout prix mais en favorisant la parole de l’enfant. Une peur peut en cacher une autre et l’angoisse se déplace bien souvent sur un objet d’élection, au point de créer parfois de véritables phobies.
4). La reconnaissance empathique
Essayons d’aller rejoindre l’enfant dans les méandres de sa peur. Aidons-le en mettant les mots sur ce qu’il vit. Ce que Françoise Dolto appelait : “ Mettre ses sous-titres à l’enfant ”.
5). L’expression de la peur sous toutes ses formes
En lui donnant les moyens d’exprimer ses peurs par différents médias : le jeu, le dessin, la peinture, les marionnettes…
6). Les réponses rationnelles aux questions
Une aide peut être apportée à l’enfant afin qu’il fasse le tri quant à sa peur. Il a probablement besoin des réponses rationnelles de ses parents face à ce qu’il ignore de l’objet de sa peur.
7). L’appel aux compétences intérieures de l’enfant
Rien de tel que d’aider l’enfant à trouver, en lui-même, les voies de guérison face à l’angoisse que génère sa peur. L’élaboration de stratégies qu’il aura découvertes, à partir de ses propres ressources, crée les meilleurs remparts possibles !
8). Le récit de nos propres expériences
Narrer nos expériences d’adulte face aux peurs peut rassurer l’enfant mais, dans un second temps : seulement après l’avoir invité à trouver sa propre voie.
9). Le souvenir des peurs vaincues
Le rappel de comment l’enfant a dépassé telle ou telle situation qui l’effrayait par le passé peut lui insuffler de la confiance pour faire face à la nouvelle.
10). La reconnaissance objective de ses propres limites
Accepter que l’enfant ne soit pas prêt à surmonter tel ou tel obstacle, c’est lui permettre de prendre conscience de l’importance de respecter ses propres limites personnelles.
En savoir plus sur http://www.signesetsens.com/psycho-aider-lenfant-a-surmonter-ses-peurs.html#ioRIsl6eHuMTBm4b.99
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