112016Nov

La peur, qu’est-ce que c’est ?

La peur, qu’est-ce que c’est ?

« Ce qui nous fait peur, dit Boris Cyrulnik, c’est l’idée que nous nous faisons des choses, bien plus que la perception que nous en avons. »

Mais qu’est-ce que la peur, au fond, sinon, au départ, un signal de notre instinct animal devant le danger ? Cette peur-là nous sauve la vie.

Le problème, avec l’humain, c’est qu’il a une imagination débordante… Le psychiatre préféré des Français nous dit comment cette imagination doit être apprivoiser, après qu’elle nous ait littéralement servi de force initiatrice.

La peur est donc  une émotion normale de l’organisme au même titre que peuvent l’être la joie ou la tristesse. Son rôle est de nous protéger plaçant notre corps en alerte lors de la réception d’un stimulus extérieur tel qu’un bruit ou image… 

Les manifestations de la peur peuvent être très différentes d’un individu à l’autre : pour certains, elle stimule. C’est le cas par exemple du trac de l’artiste. Pour d’autres, elle paralyse et inhibe toute réaction…

Renforcer l’attention et la concentration

Lorsque notre organisme reçoit un stimulus extérieur il entre dans ce qu’il est convenu d’appeler une phase de choc. Cette situation va provoquer la stimulation d’une zone située à la base du cerveau, qui va secréter de l’adrénaline et d’autres neurotransmetteurs. Ces substances  agissent sur le coeur, les vaisseaux et les muscles pour déclencher une mise en action de notre corps. Notre réponse va être plus ou moins intense et fréquente selon notre capacité de réaction à ces substances.

Dans le meilleur des cas, elle nous met sous une tension positive c’est-à-dire stimulante qui va renforcer notre attention et notre concentration. A l’inverse, certaines personnes développent des symptômes qui peuvent être gênants : douleurs abdominales, bouffées de chaleur, réactions épidermiques…

Les propos de BorisCyrulnik à propos de la peur (« L’éloge de la Peur »

Résultat de recherche d'images pour "la peur peinture" Tout d’abord, il y a deux sortes de peur :

  • il y a la peur qui est déclenchée (j’insiste sur ce mot) chez un animal par ce qu’on appelle une configuration de stimulus, c’est-à-dire que nous avons affaire à un objet sensoriel qui, sans apprentissage, déclenche la peur chez l’animal. Par exemple, il y a des animaux qui ont peur lorsqu’ils perçoivent une dénivellation. C’est le cas des chats qui, lorsqu’ils sont chatons, sont obligés d’apprendre à se balader sur les gouttières parce qu’ils ont d’emblée, peur du vide. On peut savoir ça grâce à Eibl-Eibesfeldt, un ethologue animalier, qui a fait une expérience qu’on a reproduite sur des enfants. Il prend un escalier en bois et y met une plaque de verre. Puis il lâche le chaton sur la partie opaque de l’escalier ; or quand le chaton arrive sur la plaque de verre, il n’ose pas avancer. Il met la patte pour toucher, essaie une deuxième patte, visiblement perturbé par l’expérience… Alors que si l’on met un souriceau sur la partie opaque de la plaque de verre, il se lance sans avoir peur. Donc, avant tout apprentissage, il y a des configurations de stimulus, c’est-à-dire de perceptions sensorielles, propres à chaque espèce, qui font que d’emblée certaines espèces ont certaines peurs alors que d’autres en ont de différentes. Chaque espèce a peur de son objet. Ces configurations de stimulus sont parfois plus élaborées.
  • Résultat de recherche d'images pour "la peur peinture"Par exemple, dans le monde vivant, il y a “les yeux, la forme des yeux” qui déclenchent la peur. C’est un phénomène très étonnant, un stimulus qui passe à travers les espèces. Prenons le cas des papillons qui sont assez vulnérables, qui sont souvent becquetés (c’est le cas de le dire) par les oiseaux… Eh bien, lorsqu’un oiseau s’approche du papillon, cela déclenche une chaleur ; et le papillon réagit à cette perception de chaleur en écartant les ailes ; or sur les ailes, il a des dessins d’yeux, avec des pupilles entourées de bleu et des pupilles noires. S’il n’écarte pas les ailes, il sera mangé. Mais s’il ouvre les ailes, on voit l’oiseau qui repique vers le ciel, comme s’il avait été touché, comme s’il avait littéralement reçu un coup de poing. On pourrait continuer les exemples comme celui-là, car ils sont innombrables. On peut poursuivre chez les espèces élaborées, comme les singes, les primates humains… Les chimpanzés, par exemple, ont peur des serpents. Si l’on jette un serpent de bois devant un petit singe, sans apprentissage celui-ci sursaute, il se hérisse et il s’enfuit. Ce qui fait qu’il y a un mécanisme d’adaptation. La peur est un bénéfice adaptatif qui permet probablement à certaines espèces de pouvoir survivre… Maintenant, il y a d’autres éléments dangereux qui ne sont pas perçus par l’être vivant… ou alors qui sont perçus mais dont la configuration du stimulus ne correspond pas… à l’œil du papillon par exemple. C’est dangereux, mais il n’a pas peur… et dans ce cas il se laisse détruire, sans aucune peur !

Donc la peur et le danger ne sont pas toujours associés.

  • Et puis il y a la deuxième nature de l’origine de la peur : la peur acquise. Très tôt dans le monde vivant il y a des processus d’apprentissage qui se mettent en place, donc les animaux ont très vite accès à des représentations qui sont des représentations sensorielles d’odeurs, d’images… et dans ce cas-là, s’ils sont choqués par un objet qu’ils associent au danger, ça reste dans leur mémoire, ça se grave dans leur système nerveux, et quand ils reperçoivent cet objet ou un objet analogue, ils ont appris… la peur.

Chaque individu réagit différemment

C’est principalement l’intensité des sécrétions qui va déterminer les conséquences pour l’organisme. D’autres facteurs entrent en ligne de compte : il y a probablement une composante génétique qui conduit à développer des réactions plus ou moins fortes. Cela se remarque, chez l’enfant, dès le plus jeune âge.

Certains enfants sont plus anxieux que d’autres et réagissent de façon disproportionnée à des situations inoffensives. Les facteurs héréditaires correspondraient à environ la moitié des facteurs qui aggravent les symptômes de la peur. L’environnement social a également toute son importance (parents anxieux, surprotection de l’enfant…). D’autres facteurs, tels les hormones entrent en ligne de compte. Ainsi, la puberté, la maternité et la ménopause provoquent des bouleversements hormonaux chez la femme qui vont renforcer l’anxiété et donc la capacité à développer des sentiments de peur.

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